Marcher sur une planche savonneuse

Camarades programmeurs !

Concourir au titre de chef de projet est comme marcher sur une planche savonneuse : debout au centre des attentions, une foule regardant chacun de tes mouvements, les derniers pas avant que tu ne tombes dans une mer pleine de requins qui sont nos propres doutes : Vais-je être à la hauteur de la norme établie avant moi ? Vais-je être en mesure de remplir les fonctions qui me sont accordées ? Vais-je avoir le courage et la force de traverser à la nage ? Serais-je capable ? Est-ce que quelqu'un me suivra, et marchera sur la planche avec moi ?

J'ai voyagé longtemps et loin pour être en mesure de me tenir debout sur cette planche aujourd'hui. Tout a commencé il y a un peu plus d'une dizaine d'années, lorsque j'ai eu le courage de rejoindre Debian. J'ai empaqueté quelques petites choses, adopté d'autres choses, j'ai joué le rôle de responsable de candidature avec un succès raisonnable, même contribué à hauteur de commentaires utiles, commencé de longues et houleuses… discussions ; Je me suis fait des amis et ennemis, j'ai eu le plaisir de travailler avec de brillants esprits, mais malheureusement, j'en ai déçu d'autres. Et finalement, j'ai disparu.

Mais des années plus tard, quand je suis sorti de mon sommeil et que j'ai cherché à restaurer mon ancien rang, à ma grande surprise, j'ai été accueilli. Et encore mieux, quand j'ai pu venir à la DebConf, je me suis senti à la maison. Je savais que j'étais arrivé. Cette communauté dynamique, cet étrange mélange de gens très différents qui travaillent ensemble, était fascinante à voir en personne.

Cette expérience m'a conduit à vous inviter dès maintenant, à parcourir un chemin que nous n'avons pas parcouru encore. L'empire Debian, notre réseau de distribution, avec l'immense quantité de paquets que nous avons, est déjà énorme. La main-d'œuvre brute de centaines de programmeurs bénévoles est quelque chose qui nous rend fiers. Nous sommes connus pour notre service technique excellent, et à part quelques plantages, notre qualité.

Nous avons atteints ces objectifs. Que nous reste-t-il à accomplir ? La coopération avec l'aval et l'amont ? C'est déjà en cours, et alors qu'il y a beaucoup de choses à faire, il n'y a pas de révolution nécessaire sur ce front, ni sur aucun autre. Plus de paquets, plus de développeurs ? Un problème résolu. Plus de contributeurs non développeurs ? En cours ! Comme toujours, des améliorations peuvent et doivent être faites, mais ce sont des objectifs et des souhaits pour lesquels nous avons des solutions, qui sont en cours, même si ils ont encore besoin de soins, ou font leurs premiers pas de bébé.

Quoi d'autre ? Quel est le chemin étrange que je veux ouvrir ? Quelle idée folle a cet homme debout sur la planche ?

Ce n'est probablement pas une surprise, mais ce qui nous manque est — et a toujours été — la main-d'œuvre. Pas de la brute, de la main d'œuvre pour le développement, — avec des centaines de personnes, nous sommes assez. Nous manquons de gens là où nous en avons besoin le plus : nos principaux projets, les équipes principales, où tout le monde craint de s'engager. Il y a eu de nombreuses améliorations sur cela ces dernières années, plusieurs équipes ont reçu un coup de pouce, mais je crois que l'état des choses, et surtout la façon que nous avons d'attirer de nouveaux contributeurs peuvent encore être beaucoup améliorés.

Mon objectif principal est de rendre Debian, en tant que projet, capable d'attirer des talents passionnés à l'intérieur du projet, ou de l'extérieur, ou mieux encore : les deux à la fois. Pas seulement du sang neuf, ou des esprits brillants — dont nous avons assez sur les deux fronts, et que nous continuerons sans cesse d'améliorer. Cette partie, je ne m'en inquiète pas.

Je m'inquiète à propos de la passion. Je m'inquiète, que les contributeurs que nous attirons finissent par se lasser, ou partent, et c'est un problème. Garder les gens intéressés, motivés, et passionnés est un défi, et c'est un domaine que je voudrais améliorer. Pour trouver les bonnes personnes afin de fonctionner avec la flamme, pour ainsi dire, à montrer la voie et inspirer le reste. Pour trouver des moyens, avec les équipes de base et le reste du projet, pour rendre les tâches dans des situations désespérées ayant besoin de main-d'œuvre plus attrayantes, plus gratifiantes.

Je n'essaye pas, cependant, de rendre la campagne de Debian « amusante  ». De mon point de vue, cela a été amusant durant la dernière décennie. Non, je milite pour un peu plus de… charme, si vous préférez. Il me tarde de voir le jour où la lecture des nouvelles des différentes équipes est en fait une bonne et divertissante (pas nécessairement drôle !) lecture, et pas seulement une liste de points. Alors que ces annonces « droit au but » de ce type sont utiles et intéressantes pour ceux qui sont déjà impliqués dans les équipes respectives, elles sont beaucoup plus difficiles à digérer pour ceux qui ne le sont pas. Si ces mises à jour, ces nouvelles périodiques et ces brèves pouvaient être également utilisées pour attirer plus de contributeurs… ne serait-ce pas impressionnant ?

Nous sommes très bons dans le logiciel, nous le sommes sans aucun doute quand il s'agit de les développer, et nous avons beaucoup amélioré notre communication et la publicité, mais nos tentatives de recrutement nous font — je crois — défaut. Malgré les tentatives passées et présentes, quelqu'un de nouveau dans le monde du logiciel libre pourrait trouver Debian intimidante. Je souhaite changer cela, rendre nos communications de routine accessibles aussi. J'aimerais voir des demandes d'aide bien écrites et attirantes, avec autant de questions techniques que non techniques. C'est quelque chose que j'ai pu expérimenter dans le cadre de ma participation cette année au GSoC, jusqu'à présent, je crois, avec profit. Mais il y a encore certainement beaucoup de choses à améliorer.

Mais ! Je reconnais que j'ai marmonné trop longtemps, et cette introduction s'étend déjà trop loin, donc récapitulons tout cela avec une liste à puce ennuyeuse (ce qui servira également comme un bon exemple des raisons pour lesquelles je préfère de loin la voie moins formelle, la libre circulation de la pensée utilisée jusqu'à maintenant) !

Souris dans la mer

Qui suis-je ?

Je ne suis qu'un simple programmeur, une petite souris derrière le clavier, surtout connu par mon pseudo : Algernon. Je suis né… il y a quelque temps, un peu moins de trois fois le temps qui s'est écoulé depuis j'ai initialement rejoint Debian. En dehors, j'ai le nom « Gergely Nagy » imprimé sur les documents officiels, et certaines personnes préfèrent étrangement m'appeler par ce nom, plus que par mon surnom.

J'ai fait quelques petites choses intéressantes dans ma carrière en tant que programmeur : j'ai écrit un Makefile si effrayant que je frissonne encore quand je repense à lui. J'ai travaillé en tant qu'administrateur système, écrit des scripts Perl, réinventé la roue trois fois de suite. J'ai développé sur des logiciels de diffusion de flux vidéo, et aujourd'hui je profite de la vie mouvementée d'ingénieur logiciel dans le département d'assistance de BalaBit, et passe un peu de mon temps rémunéré à travailler sur syslog-ng, rêvant de trucs de fou comme une animation de flux de journaux.

Mon travail à ce jour pour Debian

J'ai suivi l'itinéraire habituel d'un développeur Debian : développé quelques morceaux, adoptés quelques autres, écrit certains personnellement (y compris un dont je suis toujours en train d'essayer de débarrasser le monde). J'ai travaillé comme responsable de candidatures pendant un certain temps, j'en ai profité la plus grande partie, et comme beaucoup, je me suis épuisé à la fin. Au cours de ces derniers jours, j'ai contribué un peu ici et là, aussi. Les détails exacts m'échappent maintenant, mais il devrait y avoir mon nom un peu partout dans le système de gestion des bogues.

Depuis que j'ai rejoint le projet, j'ai regardé debian-bugs-dist@ comme un faucon, à la recherche de bogues mal classés à manipuler, ou d'intervenir dans les discussions que j'ai trouvées intéressantes. J'ai contribué avec un peu de code mineur ici et là, et j'ai créé dh-exec et je fais maintenant partie de l'équipe administrative du GSoC.

Mes objectifs

Mes objectifs sont, je crois, bien expliqués ci-dessus, je ne veux pas les répéter à nouveau, car il n'y a pas d'autre façon de les présenter. Toutefois, je tiens à souligner que tout l'excellent travail des chefs de projet qui a été fait durant les dernières années en a valu la peine, et je ferai de mon mieux, si je suis élu, pour suivre leurs traces, et si possible, de faire progresser leurs idées, tout en conservant ma propre vision.

Pour atteindre mon objectif d'assouvir ma passion, les outils et les accessoires sont déjà disponibles, les possibilités sont déjà présentes, attendant d'être exploités, ils ont juste simplement besoin d'être enclenchés. Je tiens à superviser cela, et regarder le monde brûler de désir de passer sa vie à développer Debian.

Mais je m'emporte — désolé !

La clé de mon objectif est la communication, la recherche de talents et de passions, et trouver un moyen de les garder. Une tâche aussi difficile que vague. Mais malheureusement, je travaille surtout par instinct, poussé par l'expérience. Cela s'est avéré utile dans mon travail quotidien et je suis confiant sur ma capacité à exploiter les diverses expériences que j'ai récoltées au cours des années pour atteindre des objectifs pour Debian.

Pourquoi suis-je apte à mener ?

Je n'ai presque pas d'expérience antérieure en tant que dirigeant. Mais j'ai travaillé sous de nombreux et différents chefs, à la fois dans le contexte de Debian, et hors de celui-ci. J'ai travaillé sous des chefs terribles, faibles ou forts, des combattants têtus. J'ai vu et ressenti tout le bien et tout le tort qu'ils peuvent causer, et j'ai appris — je l'espère.

L'expérience d'avoir travaillé avec des chefs très différents, sur des projets très différents me donne une plus ample connaissance de voir comment le chef de projet devrait travailler, et quelles sont les erreurs à éviter.

Comme je m'appuie sur l'expérience que j'ai acquise pendant les années où je développais, je suis confiant que je peux compter dessus, si je suis élu en tant que chef de projet.

Informations complémentaires

J'espère qu'au cours de la période de campagne électorale, beaucoup de questions seront posées, à propos de choses que j'aurais oubliées, ou tout simplement pas pensé à mentionner dignement.

Il n'y a qu'une chose que je veux rappeler aux gens qui lisent ce sujet jusqu'au bout : contrairement à la dernière fois, je participe pour gagner, malgré le format peut-être inhabituel de ce programme.

Réflexions

Comme le veut la coutume, dans cette section, je voudrais dire quelques mots sur les programmes de cette année — à propos de ceux de Zack et Wouter, et du mien aussi.

Stefano Zacchiroli

Le programme de Zack est… intéressant. D'une part, c'est un programme clair et bien fait, avec des plans spécifiques énumérés et les moyens de les atteindre.

D'autre part, regardant les deux points dans le préambule, l'objectif prioritaire semble être d'assurer une transition en douceur vers un nouveau chef de projet l'année prochaine, tout en lui permettant de terminer les projets en cours qu'il a dirigé ces deux dernières années.

Les deux objectifs sont louables, et les projets en suspens devront être menés à terme comme il se doit. Cependant, je pourrais imaginer un meilleur scénario pour atteindre tous ces objectifs qu'en réélisant Stefano : changer le chef de projet maintenant, et déléguer Stefano pour mener ses projets à leur terme : il est évidemment la personne la plus apte à faire ça, et lui donner carte blanche serait un choix judicieux, à mon avis.

De cette façon, Zack pourrait voir les projets en cours menés à leur terme, prendre une énorme charge de travail sur les épaules du chef de projet (et ainsi faciliter la transition), et si le temps le permet, collaborer aussi avec le chef de projet pour améliorer encore plus la transition.

Puisque ses appels à volontaires pour participer aux tâches de chef de projet ont échoué par le passé, je pense que modifier un peu la donne, en laissant quelqu'un d'autre s'assoir sur le trône et se salir les mains, accompagné par l'ancien chef de projet pour lui donner un coup de main, pourrait donner de meilleurs résultats.

Wouter Verhelst

Lors de la lecture du programme de Wouter, j'ai l'impression que nous partageons les mêmes idées, ce qui est bien, car cela signifie que les trois candidats sont à peu près sur la même longueur d'ondes, tout en ayant quelques petites différences.

Cependant, quelque chose me semble manquer à son programme, quelque chose que je trouve difficile à cerner… peut-être un manque de recul ? Cela semble aussi manquer au programme de Stefano. Peut-être que cela manque aussi au mien.

Néanmoins, je pense que le chef de projet ne doit pas seulement penser aux contraintes limitées à la durée du mandat d'un an, mais doit avoir une vision au delà de ça. Je ne vois pas cela dans le programme de Wouter, et ce n'est certainement pas non plus dans celui de Zack.

Gergely Nagy

Mon propre programme était — et est toujours — un peu expérimental, et en tant que tel, n'était pas tout à fait clair, et ne comportait que quelques réponses à la questions Pourquoi ?

Je croyais que les moyens ne devaient pas nécessairement apparaître dans le programme, la période de la campagne permettant d'en discuter et d'affiner cela. Je ne voudrais pas de plans rigides dans un programme statique, qui sera indexé et accessible pour les années à venir. Je préfère discuter des moyens sur une liste de diffusion, de façon plus interactive. Néanmoins, quelques idées génériques faisaient partie de mon programme, simplement pas sous la forme de plan d'action rigide.

Une autre chose critiquée — même si la question n'a pas encore été soulevée publiquement — est que mon programme donnait l'impression que nous avons déjà une main-d'œuvre de développeurs suffisante. Ce n'est pas le cas. Ce que je voulais dire, est que nous avons un afflux raisonnable de nouveaux contributeurs (mais qui peut, et doit certainement être amélioré) et de nouveaux paquets, que nous sommes déjà sur la bonne voie. Ce qui nous manque est à la fois la coordination de la main-d'œuvre à disposition, et de la concentrer dans les zones où le travail est encore nécessaire. Ces deux objectifs s'inscrivent dans mon désir de rendre les gens encore plus passionnés par ce qu'ils font.